Introduction
L’atelier national sur la gouvernance foncière, organisé par la FAO et l’IPAR sous la coordination du Ministère de l’Élevage, en partenariat avec le Ministère de l’Économie et des Finances, s’est tenu les 29 et 30 avril 2025 à Nouakchott. Il s’inscrit dans la dynamique de redynamisation de la plateforme multi-acteurs sur la gouvernance foncière.
Cet atelier qui a réuni une quarantaine de participants avait pour intérêt de :
- Renforcer les capacités des acteurs sur l’accès des jeunes au foncier afin de permettre une réflexion commune de la plateforme sur comment améliorer cet accès au foncier pour les jeunes ;
- Présenter les avancées menées sur les plateformes locales multi-acteurs sur la gouvernance foncière, et réfléchir à l’articulation entre les plateformes locales et nationales ;
- Renforcer la collaboration avec le Comité technique de la mise en valeur optimale du patrimoine national foncier ;
- Présenter l’état d’avancement de la conception de l’outil diagnostique visant à analyser les cadres réglementaires régissant le pastoralisme, outil qui avait été présenté lors du dernier atelier ;
- Discuter de la feuille de route de la plateforme et des prochaines étapes de mise en œuvre.
L’atelier était présidé conjointement par le Ministères de l’Economie et des Finances (MEF) et l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), et était organisé par l’initiative Prospective Agricole et Rurale (IPAR). L’atelier a rassemblé des représentants de différents ministères tels que le Ministère de l’agriculture, le Ministère des domaines, l’Agence Nationale pour le Développement de la Pêche et de l’Aquaculture dans les Eaux Continentales, ainsi que du Comité National d’appui à la mise en valeur du Patrimoine Foncier Agricole Nationale, des organisations socio-professionnelles, des représentants de l’Université et de la société civile, du secteur privé ainsi que des partenaires techniques et financiers impliqués dans le domaine du foncier rural et du développement agropastoral en général.
L’accent a été mis sur l’importance de créer une meilleure synergie entre les plateformes locales et nationales, de renforcer les collaborations institutionnelles et de jeter les bases d’un plaidoyer fort et cohérent à l’endroit des décideurs pour améliorer l’accès des jeunes au foncier.
Temps forts et interventions
Les travaux de l’atelier ont été ouverts par les allocutions officielles, qui ont marqué le ton de cette rencontre. Mme Damieux Colin, spécialiste foncière à la FAO, a été la première à s’exprimer. Elle a rappelé que la création de la plateforme nationale multi-acteurs s’inscrit dans un double cadre : d’une part, la volonté affirmée du Gouvernement mauritanien de conduire un processus de réforme foncière inclusif, et d’autre part, la mise en œuvre des Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans un contexte de sécurité alimentaire et de résilience environnementale. Elle a salué les efforts consentis jusqu’ici et a souligné l’importance de maintenir une dynamique participative.
Elle a été suivie par le Conseiller du Ministre de l’Économie et des Finances, M. Mohamed Fadel Bal, qui s’est exprimé au nom du Ministre. Il a évoqué la genèse de la plateforme, mise en place en 2017 à la suite d’un processus de sensibilisation autour des Directives volontaires. Il a mis en lumière les résultats de la redynamisation entreprise depuis cinq ans, qui a permis d’amplifier le dialogue et de renforcer un engagement commun pour une gouvernance foncière plus équitable et inclusive matérialisé par l’arrêté conjoint n° 070 du 19 janvier 2022 instituant un comité technique d’appui à la mise en valeur optimale du patrimoine national foncier agricole et désignant ses membres.
Ces allocutions ont mis en exergue l’urgence de créer des conditions favorables à une meilleure inclusion des jeunes dans les dispositifs de gouvernance foncière, dans un contexte de forte pression sur les ressources naturelles.
Les différentes sessions ont permis de rappeler l’historique de la plateforme nationale et les grandes étapes du processus de réforme foncière, ainsi que de faire le bilan des missions de terrain menées à Boghé et Kaédi. Ces missions ont révélé des défis importants, notamment l’exclusion des jeunes des instances décisionnelles locales, le manque d’accès à l’information foncière, la faible connaissance des textes juridiques, ainsi que des blocages socioculturels, des défis majeurs qui touchent davantage les jeunes et les femmes.
L’un des moments forts de l’atelier a été le panel de jeunes modéré par le Réseau des Jeunes pour l’Agriculture et l’Alimentation, où de jeunes représentants de plusieurs communes, notamment Rosso, Kaédi et Boghé, ont partagé leurs expériences et témoignages, ils ont souligné leur désir d’implication active dans la gouvernance foncière mais ont aussi dénoncé les nombreuses barrières auxquelles ils sont confrontés : complexité des procédures, manque de soutien institutionnel, stigmatisation sociale, ou encore inégalité d’accès à l’information. Cette séquence a marqué les esprits et renforcé la conviction des participants sur la nécessité de revoir les mécanismes actuels pour les rendre plus inclusifs.
En travaux de groupes, les participants ont travaillé sur des pistes d’action concrètes pour améliorer la gouvernance foncière en faveur des jeunes, en tenant compte des enjeux de genre, d’équité et de durabilité.
Principales recommandations
L’atelier a souligné la nécessité urgente de renforcer le plaidoyer de la plateforme afin qu’elle devienne un acteur capable d’influencer les politiques publiques et les prises de décision stratégiques. Ce plaidoyer doit être mieux structuré, documenté, et orienté vers les ministères concernés, les collectivités territoriales, et les instances parlementaires. Il devra s’appuyer sur des données fiables, des récits de terrain qui reflètent la réalité, ainsi qu’un argumentaire solide mettant en avant les enjeux de justice sociale et de paix.
Les participants ont également recommandé de consolider les plateformes locales et celle nationale qui doivent travailler en complémentarité, en renforçant la compétence des membres qui les composent, en les appuyant techniquement mais aussi sur les aspects logistiques et financiers. L’implication des jeunes dans les instances de gestion foncière, au niveau local comme national, doit être renforcée, en particulier celle des jeunes femmes.
Il a été jugé essentiel de promouvoir l’équité et la transparence dans l’accès au foncier, en garantissant un accès juste et apaisé aux terres, un accès à l’information à tous, et en assurant une sensibilisation continue des populations sur leurs droits et devoirs. La connaissance des textes juridiques relatifs au foncier doit être renforcée, notamment auprès des jeunes et des groupes marginalisés, afin de leur permettre de mieux défendre leurs droits et de s’impliquer pleinement dans la gouvernance foncière.
Enfin, l’atelier a insisté sur l’importance de poursuivre la mise en œuvre de la feuille de route de la plateforme, en l’actualisant à la lumière des nouveaux enjeux identifiés et en assurant un suivi régulier des actions prévues.
La plateforme a validé les actions à mener pour avancer vers une réforme foncière, notamment :
- Poursuite de l’amélioration de la coordination institutionnelle et interministérielle qui a déjà été mise en place avec la collaboration avec le Comité technique national, continuer en associant le Ministère des domaines
- L’utilité de réfléchir à l’organisation d’Etats-généraux pour stimuler la volonté des décideurs politiques pour parvenir à une réforme foncière.
- Organiser une cellule de plaidoyer
- Cibler les parlementaires pour faire porter le plaidoyer de la plateforme
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